Les assujettis à la TVA devront, dans les années à venir, utiliser des logiciels de comptabilité ou de gestion ou des systèmes de caisse sécurisés et certifiés. L’administration précise en particulier les conditions que doivent remplir ces logiciels et systèmes, les moyens de justifier du respect de l’obligation et les modalités de la procédure de contrôle spécifique.
La lutte contre la fraude fiscale
Une des fraudes les plus pratiquées par les commerçants consiste, en cas de règlement d’un client par espèces à ne pas déclarer ces sommes dans le chiffre d’affaires. Le coût pour le Trésor est double. D’une part, les ventes non déclarées viennent diminuer le résultat imposable et l’impôt sur les bénéfices, et d’autre part, le prix encaissé est TTC et la TVA est conservée par le commerçant et n’est jamais restituée à l’Etat.
Même enregistré dans une caisse électronique, la fraude peut encore être possible. En effet, certains logiciels de caisse permettent aujourd’hui de retirer des recettes comptabilisées et de rééditer les tickets de caisse sans laisser de traces.
Les changements à venir
Afin de renforcer la lutte contre la fraude à la TVA liée à l’utilisation de logiciels permettant la dissimulation de recettes, l’article 88 de la loi 2015-1785 de finances pour 2016 instaure l’obligation, pour les commerçants et autres professionnels assujettis, qui enregistrent les règlements de leurs clients au moyen d’un logiciel de comptabilité ou de gestion ou d’un système de caisse, d’utiliser un logiciel ou système sécurisé et certifié. Cela permettra donc de rendre impossible la fraude consistant à reconstituer des tickets de caisse.
Les logiciels de caisse sécurisés : un champ d’application très large
L’obligation de recourir à un logiciel de comptabilité ou de gestion ou à un système de caisse sécurisé et certifié concerne toute personne assujettie à la TVA qui enregistrent les règlements de leurs clients dans un logiciel de comptabilité ou de gestion ou un système de caisse (y compris en cas d’enregistrement par eux-mêmes sur un logiciel ou système accessible en ligne), qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales, de droit privé ou public, et même s’ils réalisent en tout ou partie des opérations exonérées de TVA ou s’ils relèvent du régime de la franchise en base.
Les assujettis qui n’utiliseraient pas de logiciel de comptabilité ou de gestion ou de système caisse (utilisation d’une caisse autonome sans fonction « enregistrement ») ne sont pas tenus à l’obligation de recourir à un logiciel ou système sécurisé certifié.
L’administration considère toutefois que l’assujetti est alors tenu de prouver, par tous moyens, cette absence d’utilisation d’un logiciel ou système, par exemple en présentant un extrait de sa comptabilité tenue sur papier.
Les données concernées sont celles qui concourent directement ou indirectement à la réalisation d’une transaction participant à la formation des résultats comptables et fiscaux, ainsi que toutes les données liées à la réception (immédiate ou attendue) du paiement en contrepartie.
Sont également concernés l’ensemble des éléments permettant d’assurer la traçabilité de ces données concourant à la réalisation de la transaction et de garantir l’intégrité de celles-ci.
Les conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données à remplir
- le logiciel de comptabilité ou de gestion ou le système de caisse doit prévoir l’accès de l’administration aux données d’origine enregistrées initialement ainsi qu’au détail daté (année, mois, jour, heure, minute) des opérations et des corrections apportées lorsque ces données ont fait l’objet de correction
- la sécurisation doit être assurée par tout procédé technique de nature à garantir la restitution des données de règlement dans l’état de leur enregistrement d’origine
- le logiciel de comptabilité ou de gestion ou le système de caisse doit prévoir une clôture qui doit intervenir à l’issue d’une période au minimum annuelle (ou par exercice). Les systèmes de caisse doivent en plus de cette clôture prévoir obligatoirement une clôture journalière et une clôture mensuelle, chaque clôture donnant lieu à des données cumulatives et récapitulatives, intègres et inaltérables calculées par le système
- la conservation des données est opérée soit en ligne, c’est-à-dire dans le logiciel ou système, soit dans une archive respectant les conditions définies par l’administration
- les données doivent être archivées, dans les conditions prévues par l’administration, selon une périodicité choisie, au maximum annuelle ou par exercice. L’administration précise par ailleurs que si le logiciel ou système sert à la tenue de la comptabilité de l’entreprise, celle-ci est soumise aux normes fixées pour la remise des fichiers des écritures comptables.
Certification du logiciel de caisse par un organisme accrédité
Il deviendra donc bientôt obligatoire, l’utilisation d’un logiciel de gestion ou d’un système de caisse satisfaisant aux conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données, attestées par un certificat délivré par un organisme accrédité ou par une attestation individuelle délivrée par l’éditeur.
Le logiciel de gestion ou système de caisse utilisé devra remplir certaines conditions en vue du contrôle de l’administration fiscale :
- inaltérabilité
- sécurisation
- conservation et archivage des données
Une procédure de contrôle
A partir de la mise en place de ce dispositif, l’administration disposera d’une nouvelle procédure de contrôle inopiné, lui permettant de s’assurer de la détention par l’assujetti des justificatifs exigés.
Il s’agit d’une procédure spécifique, qui ne relève pas des procédures de contrôle régies par les articles L 10 et suivants du LPF. L’administration ne peut pas, dans le cadre de cette procédure, examiner la comptabilité de l’entreprise, ce qui suppose l’engagement d’une procédure de vérification de comptabilité prévue à l’article L 13 du LPF.
Cependant, le contrôle de la détention des justificatifs peut être réalisé dans le cadre d’une vérification de comptabilité régulièrement engagée, sans recours à la procédure spécifique prévue à l’article L 80 O du LPF.
Quelles sont les sanctions ?
En cas de contrôle, une sanction lourde attend les professionnels ne respectant pas cette nouvelle mesure :
- l’assujetti sera soumis à une amende de 7 500 € par logiciel ou système pour lequel le certificat ou l’attestation fait défaut
- il aura pour obligation de se mettre en conformité dans un délai de 60 jours
A l’issue de cette période, si le professionnel n’est toujours pas conforme, ce dernier sera à nouveau passible d’une amende de 7 500 € par logiciel non sécurisé.
Dans certains cas, les assujettis à cette nouvelle obligation pourront se mettre en conformité grâce à une simple mise à jour de leur logiciel de caisse, dans le cadre d’un contrat de maintenance souscrit lors de l’achat du logiciel.